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Tribune Ouest France: "Décris-moi ton entreprise, je te dirai quelle est ta vision de la société"


Tribune de Gabrielle Halpern


"Les entreprises, qu’elles le veuillent ou non, jouent un rôle sociétal. Par leur modèle, leur vision, leurs engagements, leur métier, leur manière de s’inscrire dans un territoire, d’appréhender l’imprévisible, de considérer leurs clients, leurs collaborateurs, leurs fournisseurs, leurs sous-traitants, leurs partenaires et leurs concurrents, elles sont un miroir formant ou déformant de la société. Chaque dit et chaque non-dit en comité exécutif, chaque paiement ou chaque délai de paiement, chaque recrutement ou chaque non-recrutement, chaque décision ou chaque non-décision façonne, par pointillisme, la société dans laquelle une entreprise veut s’inscrire. Ce que je fais ou ne fais pas à présent est aussi important pour tout ce qui est à venir que le plus grand événement passé : dans cette formidable perspective de l’effet, toutes les actions sont également grandes et petites , écrivait le philosophe Friedrich Nietzsche.


Si l’entreprise est le deuxième acteur sur lequel les Français comptent le plus pour améliorer la situation du pays, derrière les citoyens eux-mêmes, mais devant l’État, les élus locaux, l’école ou encore les ONG, cela lui confère une nouvelle responsabilité. À l’heure où les fractures sont particulièrement importantes dans notre pays, où les inégalités sociales se creusent encore et où les institutions traditionnelles sont de plus en plus remises en question, les entreprises vont devoir jouer un rôle inédit qui va les transformer en profondeur.


Continuer à enfermer la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) dans une case, – une direction, un département, un rapport d’activité -, ne sera plus pertinent demain et elle devra irriguer toutes les autres fonctions de l’entreprise. Si un directeur financier était jusqu’à présent un directeur financier et un directeur de la RSE était jusqu’à présent un directeur de la RSE, les périmètres de leurs missions ont vocation à s’hybrider au point où le directeur financier de demain devra apprendre à devenir également un directeur extra-financier.


De la même manière, continuer à catégoriser indépendamment l’une de l’autre la logique économique et la logique sociale et solidaire, comme si elles n’avaient aucun lien, sera de plus en plus archaïque. Demain, ce qui constituera l’avantage concurrentiel d’une entreprise sera sa capacité à hybrider plus rapidement, plus efficacement et plus originalement que les autres, ces logiques a priori différentes, voire contradictoires, et à entraîner avec elle toute sa chaîne de valeur : fournisseurs, sous-traitants, clients, collaborateurs, territoires, partenaires publics, investisseurs, écoles et même concurrents ! Il s’agit d’abord et avant tout d’une certaine manière d’envisager la place de l’entreprise dans la Cité, non pas en citadelle fermée sur un îlot au milieu de l’océan, mais en place publique ouverte et en échange constant avec la société, dans une philosophie de "métamorphose réciproque".


Demain, une entreprise sera évaluée selon sa capacité d’hybridation, c’est-à-dire sa capacité à se penser comme un écosystème à même de cultiver un maillage territorial, social, générationnel, sectoriel, éducatif et professionnel (...)".


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