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Radio RCJ: « Shtisel : De l’Ehpad à l’orphelinat »

Photo du rédacteur: gabriellehalperngabriellehalpern

Dernière mise à jour : 23 mars


Cette chronique est présentée par Gabrielle Halpern chaque mardi dans le journal de 12h sur la Radio RCJ et vous offre un regard philosophique sur l'actualité.


"Ce que j’aime dans la vie, c’est que tout donne matière à réfléchir. Le pire, comme le meilleur ; le sérieux, comme le trivial. D’ailleurs, selon le philosophe Friedrich Nietzsche, c’est le seul fait de considérer la vie comme source de réflexion qui la rend supportable. Dans mes chroniques Philo, je vous parle de phrases entendues ici ou là dans mon entourage, d’expositions que j’ai vues dans des musées en France ou à l’étranger, de livres plus ou moins récemment lus, de conclusions auxquelles je suis parvenue après des heures de travail et de réflexion…

 

Aujourd’hui, je voudrais vous faire part d’une phrase qui m’a fait beaucoup réfléchir et que j’ai entendue dans la série télévisée Shtisel, actuellement en rediffusion sur Arte. Il est question d’une maison de retraite et l’un des interlocuteurs dit à l’autre : « tu sais, il ne faut pas oublier qu’un Ehpad, c’est un orphelinat… Eh bien oui, dans un Ehpad, il n’y a que des orphelins ». La phrase m’a percutée avec force et vous comprendrez aisément que je vous propose cet arrêt sur image !

 

Au-delà de la formule dont le choc créé provient de l’oxymore entre l’Ehpad et l’orphelinat, de la contradiction entre la vieillesse de l’un et l’enfance de l’autre, cette phrase vient nous rappeler la vulnérabilité immense d’une personne âgée. Vulnérabilité qui vient non pas seulement de la vieillesse de son corps, mais du fait qu’une personne âgée est aussi et d’abord une personne orpheline. Les personnes âgées ont beau avoir, pour celles qui ont de la chance, leurs enfants et leurs petits-enfants, voire leurs arrière-petits-enfants qui viennent leur rendre visite, il n’en demeure pas moins qu’elles n’ont plus leurs parents, par définition. Elles vivent dans un monde dans lequel leur père et leur mère n’existent plus. Sans compter qu’elles constituent une catégorie à part d’orphelins, puisque personne ne viendra les adopter. Alors que le mot « orphelin » est associé à celui de « l’enfance », il n’en demeure pas moins que les adultes, y compris très âgés, qui ont perdu leurs parents, ne peuvent pas être qualifiés autrement que par l’adjectif « orphelin ».  

 

Il est bon d’avoir un père ou une mère quand on a fait un cauchemar et que l’on croit qu’un monstre est caché sous le lit… Mais qui viendra consoler une personne très âgée, parce qu’elle est envahie par les fantômes ? Qui osera dire à ses enfants, à ses petits-enfants, à ses arrière-petits-enfants qu’il a peur du noir et du tonnerre ? Les enfants ont des angoisses nées de leur imagination ; celles des personnes âgées sont nées de leur vie. Elles n’imaginent pas des monstres, elles les ont vus, elles savent de quoi ils sont capables. Contrairement aux enfants, elles savent que la vie ne se termine pas comme un conte de fée. Les personnes âgées sont des orphelins d’un type particulier ; elles n’ont pas besoin qu’on vienne leur lire des histoires pour les endormir, elles ont cruellement besoin que nous écoutions la leur pour que nous restions éveillés".

 


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