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Radio RCJ: « Cathédrale Notre-Dame de Paris : et si l'être humain était aussi une cathédrale? »


Cette chronique est présentée par Gabrielle Halpern chaque mardi dans le journal de 12h sur la Radio RCJ et vous offre un regard philosophique sur l'actualité.


« Lorsque la cathédrale Notre-Dame de Paris a brûlé, nous avons été sidérés, pris à la gorge, comme à l’occasion d’un grand deuil national. Au-delà de sa dimension religieuse, historique, nationale et patrimoniale, qu’est-ce qu’une cathédrale recèle qui nous touche tant ?

 

Une cathédrale ressemble à un être humain ; ou plutôt, tout être humain est une cathédrale. En effet, dans leur décor intérieur et extérieur, ces majestueux édifices sont recouverts d’innombrables statues, sculptures, petits personnages et gargouilles… comme nous ! Oui, nous portons, incrustés en nous, les visages de ceux que nous avons rencontrés, de ceux que nous avons aimés! De ceux dont nous avons rêvés ! De ceux que nous avons lus, étudiés, médités, contredits. Ils sont tous là ! Comme ces statues de saints sculptés dans la pierre, ils sont sculptés dans notre mémoire et dans notre chair. Les gargouilles, elles, représenteraient les chimères de celles et ceux que nous avons été ou que nous aurions pu être. Elles portent en tout cas les rictus de nos regrets et de nos remords.

 

Pourquoi donc la cathédrale de Notre-Dame est-elle devenue un sujet politique ? Parce qu’un pays n’est pas si différent d’un être humain et que ce qui résonne à l’échelle individuelle fait encore davantage écho à l’échelle collective. Oui, une société est une cathédrale. Elle a ses gargouilles qui la hantent et qui lui procurent pourtant du relief, en lui donnant mauvaise conscience. Nous en avons des non-dits, dans notre pays, que nous laissons de côté dans une indifférence trop vaste pour ne pas être suspecte. Des refoulés qui apparaissent au cœur des ronds-points ; des angles morts qui brillent et qui brûlent d’être si lâchement ignorés.

 

Notre Cité a ses sculptures de pierre qui la retiennent et qui l’inscrivent dans un passé, parfois si lourdement, qu’elle n’a plus la force de se projeter dans l’avenir. Elle a ses tours et ses frontons, - nos représentants -, que nous voudrions hauts, hauts et droits, pour qu’ils nous élèvent au lieu de nous abaisser avec eux. Notre Cité a, elle aussi, ses enluminures, ses recoins obscurs, ses courants d’air glacial et son liant entre les pierres que les années effritent.

 

Alors que nous sommes toujours autant divisés qu’il y a un siècle, deux siècles, trois siècles et que notre situation politique est fragile, la réouverture de la cathédrale de Notre-Dame marque notre inconscient collectif d’une conviction : si l’irréversible existe, il ne devrait jamais y avoir d’irréparable ».


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